Le SGMAP (Secrétariat Général à la Modernisation des Politiques publiques) a organisé le jeudi 6 novembre 2014 un large événement pour faire le point de l’évaluation après 2 ans de MAP (Modernisation de l’action publique, plus d’infos sur cet article) devant une assistance choisie composée principalement de hauts fonctionnaires d’Etat.

Le séminaire « Deux ans d’évaluation de politiques publiques : bilan et perspectives » au studio 106 de la Maison de la radio. Photo SGMAP
Ces débats sont désormais accessibles en ligne à chacun par l’entremise de vidéos complètes des interventions enregistrées (Yves Saint-Geours,Najat Vallaud-Belkacem, Claudy Lebreton) et des 3 tables rondes :
- Des évaluations de politiques publiques : quels résultats ?
- Quelles clés de réussite des évaluations de politiques publiques ?
- Quelles politiques publiques évaluer ?
Aussi intéressantes sont les vidéos d’introduction et de conclusion de Thierry Mandon, et surtout la vidéo de synthèse de la journée pour un rattrapage rapide.
Morceaux choisis (transcription à la volée, seul le prononcé fait foi)
L’évaluation au niveau gouvernemental
Laure de La Bretèche (SGMAP): l’évaluation n’est pas technique, elle emporte des conséquences et des engagements politiques fondamentaux
L’évaluation demande de l’humilité : du décideur qui doit entendre les parties prenantes, des corps d’inspections qui doivent collaborer des évaluateurs qui ne sont pas du même sérail.
Ian Davies (consultant): Le consensus sur comment on va utiliser l’évaluation est plus important que le consensus sur le résultat
Jean-Paul Duport : L’évaluation n’est pas qu’un problème de recherche en économie.
Emmanuelle Wargon (DGEFP) : Dans la réforme de l’Etat, l’évaluation est plutôt la partie facile…et après “y a plus qu’à”.
De l’opportunité d’évaluer
Emmanuelle Wargon : on lance une évaluation quand on est prêts à se remettre en question
De l’utilisation des évaluations de politiques publiques
Emmanuelle Wargon : l’évaluation a un effet latent : les administrations mettent en œuvre avec à l’esprit les critères d’évaluation de leur politique publique. (Exemple à l’appui du nouveau partenariat DGEFP/Pôle emploi/Mission locale)
Au-delà du plan d’action, c’est plutôt les formes de restitution qui sont à travailler (…) On passe beaucoup de temps sur la méthodologie de l’évaluation mais trop peu sur la conduite du projet jusqu’au bout.
Marc Abadie (IGA) : il y a beaucoup de progrès à faire au niveau de l’Etat sur la conduite de projet jusqu’au changement. Le travail ne doit pas s’arrêter au rapport. On manque d’outils, de formations là-dessus !
Deux ans d’évaluations..trop d’évaluations?
Marc Abadie : 60 évaluations lancées, il y a un risque d’overdose
Jérôme Fournel (IGF) : Dans l’administration, vous avez l’impression qu’il y a tout le temps des évaluateurs qui débarquent. Des dizaines de gens qui viennent vous voir chaque année pour vous demander comment vous travaillez.
Monique Rabin (Députée) : 52 évaluations lancées en même temps, vous n’imaginez pas qu’on va lancer 52 réformes d’ampleur en même temps ?
Évaluation et maîtrise budgétaire
Monique Rabin : Comment on va économiser 50 milliards ? Par tous les moyens, y compris en rognant les moyens pour l’évaluation.
J. Fournel : Rappelons que les politiques publiques produisent des services publics avec de la ressource publique. Pas l’inverse.
J. Fournel : il y a un problème quand il y a d’un côté des évaluations (avec parfois des objectifs d’économies), et de l’autre des cadrages budgétaires qui imposent des réductions globales s’appliquant à tous.
Emmanuelle Wargon : Le processus budgétaire prend à revers l’évaluation s’il arrive en cours de processus. Si au milieu de l’évaluation on apprend qu’il faut couper les budgets, c’est toute l’évaluation et la crédibilité du décideur qui sont remis en cause.
La communication des évaluations
Thierry Mandon : Tous les rapports d’évaluation de la MAP doivent être rendus publics
Si on est pas prêt à publier un rapport d’évaluation, c’est qu’on était pas prêt à lancer une évaluation de politiques publiquesJean-Paul Duport : La publication est une exigence démocratique, il n’y a pas de débat à avoir là-dessus.
Ian Davies : Ford proposait de choisir la couleur de votre voiture, pourvu qu’elle soit noire. Les scénarios en évaluation c’est un peu pareil : 1 seul est faisable.
Ian Davies : quand je fais une évaluation, j’évite absolument de faire des recommandations. de peur qu’elles soient appliquées.
Sur l’association des parties prenantes
Pierre Boissier : L’association des parties prenantes, plutôt oui, mais il faut veiller à ne pas donner du pouvoir à des intérêts particuliers.
Marianne Bondaz (IGAS): l’association au comité de pilotage, c’est compliqué. Et puis le rôle du comité de pilotage n’est pas bien défini.
Ian davies : plusieurs facteurs contribuent à une association de parties prenantes réussie :
1/les commanditaires doivent avoir les idées claires, sur ce que l’on propose aux parties prenantes,
2/il faut être clair sur les règles du jeu (publication, qui décide, que se passe-t-il après, etc.)
Piere Savignat (SFE) : L’association des parties prenantes est complexe et porteuse de risques. Mais elle est nécessaire même pour les politiques les plus sujettes à controverses. Et même peut-être en priorité pour celles-là. De toute façon, la confrontation aura lieu. Autant créer des espaces pour avoir des espaces pour anticiper, rendre entendable les points de vue et favoriser leur capacité à se comprendre à défaut de les homogénéiser.
Indépendance, impartialité et objectivité
Pierre Boissier (IGF) : Les évaluations des corps d’inspections sont indépendantes. Les rapporteurs s’engagent juridiquement, ils répondent aux questions posées selon les procédés de leur choix.
Marianne Bondaz : Les chercheurs apportent une base objective sur le diagnostic.
Ian Davies : l’objectivité ce sont des données et un processus visibles, opposables. Le jugement est nécessairement subjectif, mais sur base de données objectives. L’évaluateur est autonome s’il est en mesure d’apposer un jugement en toute sérénité, sans contraintes ni pression d’une partie prenante.
L’impartialité est que l’évaluateur n’a pas d’intérêt dans l’évaluation. Les parties prenantes en revanche ne sont pas impartiales.
L’évaluateur externe est dépendant financièrement de son commanditaire. Mais il doit être indépendant de ceux qui gèrent le programme.
Marianne Bondaz : L’indépendance, c’est très bien. Mais il faut aussi des évaluateurs capables de sortir du cadre.
[Séminaire EPP] Synthèse des tables rondes par SGMAP
Dans un autre article, la Vigie s’attarde plutôt sur le bilan présenté par Vincent Maymil, chef du département, lors d’un court exposé méthodologique.
Enfin, une synthèse des contributions de la salle est également proposée:
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